New York demeure et demeurera un fantastique terrain de jeu pour tous les photographes et, dans le cas présent, pour les «street photographers», terme générique qui désigne les photographes humanistes dont le sujet principal est une présence humaine, indirecte ou directe, dans des situations spontanées et dans un lieu public. Les plus connus sont entre autres Henri Cartier-Bresson, Robert Doisneau, Robert Frank, William Klein, Vivian Maier ou Daido Moriyama, pour n’en citer que quelques-uns.
Cette ville possède une énergie, une diversité de thèmes et de personnalités incroyables pour explorer son nouvel ou ancien appareil photo. À chaque visite de la ville, j’y suis allé avec un appareil photo à tester : cette fois-ci, c’est un Fuji X100F. C’est en fait la quatrième mouture (le F étant pour fourth) de cette déclinaison. Il a été présenté à la Photokina (le plus grand et plus important salon dans le monde de la photographie qui se déroule à Cologne en Allemagne tous les deux ans, et ce, depuis 1950) en septembre 2010 et a été commercialisé en février 2011. Entre ces deux jalons, il y a eu les X100S et X100T, et chaque mouture Fuji améliore beaucoup la version précédente.
Le Fuji X100 a été le premier modèle des appareils de la série X et il a été rejoint depuis par de nombreux autres notamment le modèle X-Pro2 que j’ai eu la chance de passer en revue dans ce magazine et d’acquérir l’an dernier. C’est par la série des X que Fuji a fait une percée très remarquée auprès d’amateurs de beaux boitiers. Le X100 a reçu le prix TIPA (Technical Image Press Association) du meilleur appareil photo de prestige en 2011 et le prix EISA 2011-2012 du meilleur appareil compact expert.
UNE COURTE HISTOIRE DE FUJIFILM
Cela fait très longtemps que FujiFilm fait partie intégrante du monde de la photo, puisque c’est en janvier 1934 qu’a été créé Fuji Photo Film Co., Ltd. Depuis ce jour, les brevets et les innovations se suivent, comme le premier reflex à cellule silicium, le premier compact, le premier appareil numérique avec carte mémoire, le premier reflex numérique à saisie intégrale de l’image dans le viseur, et ça va certainement se poursuive. Fuji a vraiment très bonne presse parmi les photographes aussi bien amateurs que professionnels. Dernièrement, la firme japonaise a sorti le Fujifilm GFX 50S, moyen format de 51 millions de pixels ; la suite de l’aventure va être passionnante.
FICHE TECHNIQUE
Cette nouvelle mouture reprend le capteur du Fuji X-Pro2 : l’optique fixe est un Fujinon 23 mm f/2 (huit éléments répartis en six groupes, distance de mise au point minimale de 10 cm, ce qui donne un équivalent de 35 mm en 24 x 36). C’est la première fois en 35 ans de photo que j’évalue un appareil ayant un objectif fixe que l’on ne peut pas changer. Vous êtes en 35 mm, un point c’est tout, rien de plus rien de moins, et comme disait Robert Capa: «Si vos photos ne sont pas assez bonnes, c’est que vous n’êtes pas assez près.» Ça limite les choses. Oui et non! Pour faire de la photo de rue, c’est un avantage. Le X100F peut disparaître dans la main, il devient vite invisible, et si les gens le voient, on passe très rapidement pour un touriste.
À part bien sûr pour les photographes amateurs de beaux appareils photo. Là par contre, on devient vite le centre d’attention et on entame des discussions passionnées autour de cet appareil photo à l’aspect si vintage. De loin, on ne peut pas savoir si on a affaire à un Leica antique ou à un nouveau modèle. Au mois d’avril, je suis parti avec le Nikon D5 pendant trois semaines au Vietnam, et là, le rapport à l’autre est fondamentalement différent. Les volumes de l’appareil et de l’objectif sont aux antipodes: d’un côté un reflex professionnel, gonflé aux hormones, surpuissant, aux rafales démoniaques, et de l’autre un hybride Mirrorless qui tient dans la main et passe inaperçu. Pour les portraits de rue, l’avantage va sans conteste au X100F et comme disait Roland Topor: «On reconnaît facilement le photographe professionnel au milieu d’un troupeau de touristes: c’est celui qui cache son appareil.» C’est facile de prendre des portraits et de capter des scènes de rue avec un tel appareil. Mais ne vous y trompez pas, il n’est pas limité, loin de là. Tout d’abord, il intègre un capteur qui a fait ses preuves, le APS-C X-Trans CMOS III de 24,3 Mpx (23,6 mm x 15,6 mm) et son écran est un TFT LCD de 7,6 cm avec 1 040 000 points, d’un ratio de 3/2 avec une couverture de 100 %.
Aux dimensions de 126,5 x 74,8 x 52,4 mm, au poids de 469 g (comprenant la batterie et la carte mémoire), le X100F est moins imposant qu’un Leica et la construction est moins superlative, mais demeure très au-dessus de la moyenne. Je ne le sortirais pas sous une pluie battante, car il ne possède pas de joints toriques qui le protègent du ruissellement. Il a les codes graphiques des appareils des années 50 ou 60, vintage jusqu’au bouchon métallique protégeant l’objectif. Deux couleurs sont proposées : noir ou argent.
À droite de l’écran, Fuji a regroupé les sélecteurs et les molettes. La molette des vitesses sur le dessus de l’appareil possède un second sélecteur intégré qui laisse apparaître une petite fenêtre pour le réglage de la sensibilité ISO de 200 à 12 800. Elle autorise aussi le choix d’un mode Auto et des sensibilités étendues : Low (100 ISO) et High (25 600 ou 51 200 ISO). À droite de cette molette, la correction de l’exposition +/- 3 a une position C qui permet d’aller jusqu’à +/- 5 IL. Comme le Fuji X-Pro2, un viseur hybride propose de basculer entre visée optique directe et visée électronique. Le changement se fait par une simple manipulation de la tirette se trouvant sur la face avant de l’appareil. Par rapport au X-Pro2, il y a un seul emplacement SD, qui est compatible avec les cartes SD, SDHX et SDXC.
En ce qui concerne la batterie, Fuji a eu la bonne idée de prendre la même que les X-Pro2, X-T2 et X-T20, avec une autonomie d’environ 390 prises de vue lors de l’utilisation du viseur optique et de 270 déclenchements lorsque l’on choisit le viseur électronique. Il vous faudra évidemment une deuxième batterie dans votre sac photo. J’ai trouvé un chargeur USB pouvant recevoir deux batteries en même temps et pouvant se brancher sur un chargeur connecté sur la prise de l’allume-cigare de votre voiture ou sur une batterie externe pouvant également recharger votre téléphone ou votre tablette, le tout dans votre sac à dos pendant une randonnée.
Le Fuji X100F est taillé pour la route, pour les paysages et les images urbaines. Il est moins utile pour prendre des photos de sport ou animalières à cause de son objectif fixe qui limite son champ d’action. Par contre, il y a deux possibilités pour combler cette limite : le Fujifilm WCL-X100, un convertisseur grand-angle qui se greffe sur l’objectif et apporte un coefficient de 0,8x, pour atteindre le 28 mm en équivalent 24 x 36 pour un 150 grammes de plus, et le Fujifilm TCL-X100 qui aura lui un coefficient de 1,4 pour atteindre le 50 mm. On perd en discrétion évidemment et surtout en portabilité. Avec ce genre d’ajout, c’est beaucoup moins facile de glisser son appareil sous sa veste et surtout, le prix de ces deux sur-objectifs fait monter l’addition de quelques centaines de dollars, ce qui n’est pas rien.
ET LA QUALITÉ DANS TOUT ÇA
Le Fuji X100F livre des images dignes de ce nom, riches en couleurs et bien piquées, surtout en réglant l’ouverture de l’objectif entre f/4 et f/8, jusqu’à 3200 iso. Le bruit n’est pas présent, et elles sont exploitables jusqu’à 6400 iso. Pour un appareil de photos de rue, c’est un très bon score, il est léger, compact, il tient dans une poche et possède une fiche technique digne de ce nom : c’est le compagnon idéal pour une grande virée urbaine. Le mode vidéo atteint le Full HD (1920 x 1080 px) ou le HD (1280 x 720 px) avec des cadences de 60, 50, 30, 25 et 24 images/seconde. Ce Fuji est toutefois dépourvu de tout système de stabilisation, donc attention au bouger ou installez-le sur un pied pour filmer.